Moins de quatre mois après l'achat, leur nouveau propriétaire a revendu ses immeubles le double du prix. Une situation inacceptable qui met en lumière les pratiques abusives de certains propriétaires et l'urgence de protéger les droits des locataires au Québec.
Photo : Le journal de Montréal
Par Anouk Lebel
Daniel Collin se plaint d'avoir reçu des visites et appels répétés pour quitter son studio dans cet immeuble de 28 logements d'Hochelaga-Maisonneuve. Ce n'est pas une situation isolée. En tant que défenseur des droits des locataires, je suis témoin quotidiennement de ces tactiques d'intimidation. Il est crucial de comprendre que ces actions sont illégales et que les locataires ont des droits!
Pression, chèques non encaissés : un schéma alarmant
Des locataires montréalais dénoncent que leur nouveau propriétaire aurait tout fait pour les faire partir avant de revendre ses immeubles le double du prix quatre mois plus tard. C'est une véritable spéculation immobilière qui se fait au détriment des familles et des individus qui cherchent simplement un toit.
« Ils venaient cogner aux portes en personne ou nous téléphonaient. Ça pouvait aller de 6h le matin à 9h le soir. Moi, ça a été jusqu'à 15 fois par semaine», s'exaspère Daniel Collin. Ce harcèlement constant est une forme de pression psychologique inacceptable. Un propriétaire n'a pas le droit de rendre la vie de ses locataires infernale pour les forcer à partir.
Le signaleur routier habite, depuis environ neuf ans, un studio qui lui coûte 600$ par mois dans un immeuble de 28 logements de l'avenue Pierre-De Coubertin, dans l'arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve. Il affirme que les problèmes ont commencé quand son immeuble et l'immeuble voisin ont été vendus, fin octobre.
« Ils ont commencé à faire des travaux en face de chez moi, ils voulaient me forcer à partir», dit-il. Ces "travaux" sont souvent une excuse pour rendre le logement inhabitable et pousser les locataires à la rupture du bail.
Chèques non encaissés : une tactique pour créer de l'incertitude
M. Collin affirme que c'est, entre autres, Avi Elkeslassy qui s'est présenté comme le nouveau propriétaire des immeubles. Ce dernier est un employé de Leyad, une société immobilière dirigée par Henry Zavriyev, dont les locataires ont maintes fois dénoncé les tactiques pour les pousser à déménager. Leyad est tristement connue pour ses pratiques agressives et son manque de respect envers les locataires.
M. Elkeslassy n'est pas propriétaire des immeubles, qui ont plutôt été achetés par l'entreprise Immeubles Hercules. Il se serait toutefois présenté chez les locataires, toujours en se présentant comme le nouveau propriétaire. Cette confusion intentionnelle est une tentative de déstabiliser les locataires et de les amener à prendre des décisions hâtives.
« Il était avec un autre homme. Ils voulaient m'obliger à résilier mon bail. Ils m'ont dit que tant que je ne signerais pas, ils ne me laisseraient pas en paix», soutient par exemple Seydoux Zakané, qui habite l'un des immeubles depuis sept ans. C'est une menace claire et une violation de la loi.
L'homme de 43 ans a entrepris des démarches au Tribunal administratif du logement (TAL) pour forcer le propriétaire à encaisser ses chèques de loyer. « Ils n'ont pas encaissé mes chèques de janvier et février et refusaient de me donner un reçu», explique celui qui paie son logement 785$ par mois. Refuser d'encaisser les chèques et de fournir un reçu est une manière de créer un doute sur le paiement du loyer et de justifier une éventuelle expulsion.
Une revente lucrative au détriment des locataires
Les deux immeubles qui comprennent en tout 52 logements ont été achetés 7,6M$ le 28 octobre. Immeubles Hercules les a revendus 16M$ le 25 février dernier. Un profit colossal réalisé en quelques mois, sur le dos des locataires!
« C'est toujours la même technique. Ils sont très insistants. Ils frappent, appellent, mettent beaucoup de pression», explique l'avocat en droit du logement Manuel Johnson. Il représente des locataires dans ces immeubles, mais aussi dans deux autres immeubles ayant appartenu à Immeubles Hercules, dans Notre-Dame-de-Grâce et à Lachine. Ces cas confirment un schéma de harcèlement et de spéculation immobilière.
Ces deux immeubles achetés en juin 2024 ont aussi été revendus beaucoup plus cher moins d'un an plus tard. Il est temps que le gouvernement prenne des mesures pour encadrer ces pratiques et protéger les locataires.
Le cabinet de relations publiques National, qui représente Henry Zavriyev et son entreprise Leyad, a renvoyé nos demandes au propriétaire. Propriétaire d'Immeubles Hercules, le courtier immobilier Trifonas Terry Geramanis n'a pas répondu à nos demandes. Son assistant a dit ne pas être courant de la situation, avant de nous raccrocher au nez. Ce silence est révélateur.
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Vos droits en tant que locataire au Québec
Il est essentiel de connaître vos droits en tant que locataire au Québec. La Loi sur la location d'immeubles (voir ici) protège les locataires contre l'éviction abusive et le harcèlement. Vous avez le droit à un logement décent, à la tranquillité et à la vie privée. Le harcèlement, les menaces et les pressions pour quitter votre logement sont illégaux.
Si vous êtes victime de telles pratiques, vous pouvez déposer une plainte auprès du Tribunal administratif du logement (TAL) (voir ici). Le TAL peut ordonner au propriétaire de cesser ses agissements et vous accorder des dommages-intérêts.
N'hésitez pas à consulter un avocat spécialisé en droit du logement pour obtenir des conseils personnalisés. Il existe également des organismes communautaires qui offrent de l'aide juridique gratuite ou à faible coût.
En tant que locataire, vous avez le pouvoir de vous défendre. Ne laissez pas les propriétaires abusifs vous intimider. Connaissez vos droits et faites-les valoir!
– Avec la collaboration de Marie Christine Trottier, du Bureau d'enquête
Avertissement : Les informations contenues dans cet article sont fournies à titre informatif seulement et ne constituent pas un avis juridique. L'équipe de Très Bons Locataires, Mauvais Proprios n'est pas composée d'avocats et ne peut vous représenter devant le Tribunal administratif du logement. Si vous avez besoin de conseils juridiques, veuillez consulter un avocat qualifié. Nous vous recommandons de consulter les sources officielles mentionnées dans l'article pour obtenir des informations précises et à jour.
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